Writer Bonnard Lawson

Maître Pierre-Yves Lucas, avocat installé à Dubaï, est spécialisé dans la rédaction de contrats et dans les montages juridiques relatifs à tous types de transactions commerciales et en matière d’arbitrage international. Il nous parle aujourd’hui de son métier, des problématiques rencontrées, mais aussi de son ressenti sur la place des Français et des entreprises françaises au sein des pays du Golf.

Lepetitjournal.com/Dubaï : En mai 2015, vous finalisez un partenariat de votre cabinet d’avocat parisien TRILLAT & ASSOCIES avec le cabinet BONNARD LAWSON à Dubai. Pouvez-vous nous présenter votre parcours professionnel ?

Je suis d’origine bretonne, je suis donc toujours un peu tourné vers le large. J’ai commencé à étudier le droit à Rennes pour finir mes études de droit maritime en Angleterre puis aux Etats Unis. J’ai notamment un master en droit maritime. C’est une spécialisation qui vous demande de voyager énormément, ce qui ne me déplaît guère ayant vite été attiré par la vie à l’étranger. J’ai intégré le cabinet parisien GIDE LOYRETTE NOUEL, mais mon envie de partir à l’international me démangeait chaque jour un peu plus. C’est ainsi que j’ai été envoyé à Riyad pour prendre la direction du bureau saoudien de ce cabinet parisien. J’y suis resté avec ma famille cinq ans. J’ai travaillé essentiellement pour des entreprises françaises spécialisées dans les domaines tels que le pétrole et le BTP, mais aussi pour l’État français et ses officines dans le domaine de l’armement. Je me suis spécialisé dans la rédaction de contrats pour des projets porteurs ce qui est très positif comme démarche contrairement à l’activité contentieuse à certains égards, anti-économique. Par exemple, nous nous occupions de rédiger des contrats dans le cadre des ventes de sous-marins, contrats qui rapprochent les pays qui se retrouvent engagées dans une sorte d’obligation de réussite ou de bon résultat.

Nous sommes ensuite rentrés à Paris afin que nos enfants poursuivent leurs scolarités. Après plusieurs années, j’ai rejoint le cabinet TRILLAT & ASSOCIES en tant qu’associé toujours dans le domaine de l’arbitrage et des transactions internationales et ai donné des cours de droit international à l’Université Paris V. Cette étape française ne m’a pas empêché de voyager encore dans de nombreux pays. Puis l’année dernière, connaissant déjà bien la région, nous avons décidé avec mes partenaires d’ouvrir un bureau à Dubaï.

Vous qui avez voyagé et travaillé dans de nombreux pays, pourquoi avoir choisi cette destination ?

Je me suis toujours plu dans les pays arabes, c’est un peuple très accueillant. Ma première expatriation familiale, qui fut donc en Arabie Saoudite à Riyad, était une destination choisie et fut une expérience heureuse. Le choix de Dubaï, aujourd’hui, vient du fait que c’est une place économique en pleine expansion. De nombreuses entreprises françaises s’y implantent chaque année. C’est aussi un Hub qui vous permet de développer vos activités à l’international avec une très grande sécurité juridique. A cet égard, il est très intéressant de souligner le fait que les bases juridiques, contractuelles et comptables des Émirats Arabes Unis sont d’origine française. En effet, le droit civil dans la région provient du code napoléonien qui a été importé par les Égyptiens et ne provient en aucun cas des anglo-saxons. Il est donc tout à fait légitime d’ouvrir un cabinet français à Dubaï.

Présentez-nous les problématiques auxquelles votre cabinet répond ?  

Nous intervenons essentiellement dans l’accompagnement des entreprises qui souhaitent s’implanter ou qui exercent une activité à Dubaï ou à partir de Dubaï. Il y a beaucoup de problématiques qui se posent quand vous souhaitez ouvrir une société et des pièges qu’il faut savoir éviter. Par exemple, beaucoup pensent naïvement qu’il suffit de s’installer dans une zone franche afin de se soustraire de toute contrainte et notamment du sponsorship local. C’est vrai qu’avec plus d’une vingtaine de zones franches dans les EAU, c’est assez tentant. Tout d’abord, il faut noter qu’être en zone franche, ne vous exonérera pas d’avoir une licence qu’il conviendra de renouveler tous les ans. De plus, être en zone franche, vous permet, certes, de commercialiser votre activité dans les pays de la région et ailleurs, mais en aucun cas avec les entreprises locales ou sur le territoire des EAU. Point souvent oublié par les principaux intéressés qui peuvent vite se retrouver dans l’illégalité. L’absence de sponsor ou d’imposition n’est pas à ce point permissive.

Nous occupons aussi des ressortissants pour les testaments et la garde des enfants. La responsabilité des dirigeants français d’entreprises à la lumière de la récente loi sur la liquidation prend un nouveau relief. Enfin, l’évolution de la jurisprudence nécessite de revisiter les accords passés avec les sponsors lesquels sont extrêmement exposés par la nouvelle réglementation contre la dissimulation commerciale.

Si vous aviez un message à faire passer aux entreprises françaises installées aux Émirats, quel serait-il ?

Le message est assez simple : jouer la carte du savoir-faire français ! Les relations entre nos deux pays sont très fortes. Nous avons une présence militaire importante dans la région, signe des relations étroites entre nos deux nations. Il y a beaucoup de Français aux spécialités très pointues installés à Dubaï et qui ne sont pas assez visibles. Nous avons des atouts incroyables que nous devons exploiter plus largement ; tout le monde y serait gagnant. Et l’initiative du FBC ‘’Speed Meetings’ de faire se rencontrer les petites et les grandes entreprises françaises dont le LPJ s’est fait l’écho, va vraiment dans le bon sens.

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